
“Les voix du feu – Mémoire de la Forge de Commentry”
À Commentry, il y a un lieu dont les murs se souviennent.
Des murs noircis par le travail, chauffés par la flamme.
On l’appelait la Forge.
Elle a vu naître la ville, grandir des familles, vivre des générations entières.
Tout a commencé au XIXᵉ siècle.
Le fer, le charbon, la sueur…
Les hommes entraient jeunes, ressortaient usés, mais fiers.
Nos grand pères, nos pères, qui travaillaient à l’usine, rentraient les poumons brûlants, les mains sales, mais la tête haute.
Puis la Forge est devenue Erasteel.
Le métal s’est transformé, les métiers aussi.
Le recyclage a remplacé les grands feux, mais l’esprit des ouvriers était toujours
celui du travail, de la solidarité, du courage.
Mais un jour, tout a changé.
Des postes supprimés, des ateliers vidés, des regards inquiets.
Le bruit s’est peu à peu arrêté, et le silence a pris sa place.
Ils ont parlé de modernisation, d’investissements, de rentabilité
mais dans les cœurs, c’était surtout de l’inquiétude et de la tristesse. De la déception aussi.
A chaque départ, c’était une flamme qui s’éteignait.
Devant l’usine, le grand Forgeron veille toujours.
Son marteau levé rappelle les mains noircies, les visages marqués,
et la fierté d’un peuple ouvrier.
Aujourd’hui, ils prévoient d’éteindre définitivement les fours. Mais dans chaque maison Commentryenne
il reste une gamelle, une musette, un bleu de travail, une photo ou un souvenir. Et il y a encore l’espoir d’une dernière mobilisation pour ne pas perdre un savoir faire inestimable et un patrimoine irremplaçable.
La Forge a forgé le métal…
et les hommes qui l’ont travaillé.
Et même si la flamme s’éteint petit à petit,
le feu, lui, brûle encore dans les coeurs et dans la mémoire de notre cité.
