La Turquie: un pays tiraillé entre deux régimes

En 1923, suite à la chute de l’Empire Ottoman, naissait la Turquie, pays actuellement sous le contrôle du chef d’état Erdogan, cet état en apparence démocratique l’est-il aussi dans le fond ?

Texte écrit par Audrey Chanal et Elsa Chanal

Mosquée Sainte Sophie à Istanbul
Erdogan
Mustafa Kemal Atatürk nom pris à partir de 1934 par Mustafa Kemal Paşa -  LAROUSSE
Mustafa Kemal

     La Turquie est un pays qui est apparu lors de l’effondrement de l’empire Ottoman en 1923. Il s’étend de l’Asie mineure à l’Europe de l’Est et doit sa création à l’homme d’état turc Mustafa Kemal (1881-1938). Mustafa Kemal étant le premier président de la Turquie à vouloir en faire un pays moderne et viable. La Turquie compte aujourd’hui plus de 82 millions d’habitants et est gouvernée par le chef d’état Recep Tayyip Erdoğan. Depuis l’arrivé de Erdogan en 2003 en tant que premier ministre puis en 2014 de nombreux changements ont eu lieu. Il repose sur un programme alliant nationalisme et islamisme. Actuellement ce pays pose de gros débats sur le type de régime présent. Nous pouvons nous demander si le pays entretien une démocratie ou bascule vers une dictature? Pour cela nous allons plonger dans la Turquie des années 90 pour analyse ensuite la Turquie d’Erdogan.

La Turquie avant Erdogan : une lente démocratisation

   Avant l’arrivée d’Erdogan, la Turquie essayait de se démocratiser malgré plusieurs complications. A sa mort le 10 novembre 1938, Moustafa Kemal Atakur laissait derrière lui une Turquie laïque et en apparence occidentalisée. Et pourtant, dès que le régime commença à s’ouvrir à la démocratie dans les années 1950, l’instabilité alla de pair avec la lente affirmation d’un islam politique, ponctuée régulièrement de coups d’État militaires de 1980 à 1983. La Turquie est dirigée par une dictature militaire avec le dictateur Kenan Evren pendant l’année 1984. Après cette année mouvementée, la démocratisation progresse. L’armée se met en retrait mais garde toujours un minimum de pourvoir sur le régime. Au niveau économique, une énorme montée en puissance a lieu malgré les 3 crises financières (1994-1999-2001). La Turquie a été reconnue candidate dans l’union européenne en 1999, et la cour constitutionnelle interdit le parti islamiste donc la religion ne fait presque plus partie du pouvoir. Même si le parti islamiste est interdit, le régime démocratique souffre des tensions entre les islamistes et les laïques. En 1999, le parti de gauche est un parti démocratique et le parti de droite est un parti de la juste voie. Enfin en 2002, l’abolition de la peine de mort est prononcée et un élargissement de la liberté de la presse est mis en place. Le gouvernement Turc essaye de faire de nombreux efforts pour démocratiser le pays mais cela reste très complexe à cause de la puissance militaire et le fait que le gouvernement devient “laïc”.

La question kurde

Ocalan
Le Kurdistan

   La démocratisation est également freinée à cause du problème Kurde qui agite la vie géopolitique de la Turquie depuis 1923. Les kurdes représentent une minorité dans le pays environ 20%. Le gouvernement refuse l’existence de la minorité kurde, il l’interdit la langue kurde et met en place des répressions permanentes menées par l’armée au kurdistan. En 1978, Ocalan qui est un homme politique turc fonde le parti des travailleurs du kurdistan (PKK), union du nationalisme kurde. Voulant passer à l’action armée, ses membres subissent la répression. L’insurrection du PKK attaque véritablement en août 1984 dans la région de l’Anatolie du Sud-Est et s’étend au fur et à mesure à l’ensemble de la région et aux provinces voisines. Finalement en 1990, le gouvernement turc reconnaît l’existence et l’identité des kurdes et promet un investissement économique dans la région et un investissement dans la vie politique. Mais le gouvernement continue des offensives contre le parti ennemi. La direction du PKK se rallie au milieu des années 1990 à l’idée que la guerre ne peut trouver d’issue militaire, les kurdes continuent de faire pression. Abdullah Ocalan déclare en 1997 : « Si le gouvernement turc se déclare sérieusement prêt à négocier, nous sommes prêts à proclamer le cessez-le-feu et à ouvrir des négociations ». En février 1999 Ocalan est capturé à Nairobi et un an plus tard les PKK déclare un cessez le feu. Dorénavant il ne reste que quelques personnes de ce parti dans le nord de la Turquie.

    Enfin la démocratisation a été impactée par une grave crise économique. En 2000 à la suite d’un désaccord entre le président (Sezer) et le premier ministre (Ecevit). Elle s’est ensuite transformée en crise économique. En 2001, la monnaie turque a perdu 50 % de sa valeur le gouvernement a mis en place des réformes économiques comme une autonomie de la banque centrale, saisie ou fermeture de banques insolvables, la recapitalisation des plus grandes banques publiques et la restructuration des principaux établissements et ces réformes ont permis de remettre en état le secteur bancaire et financier. Une nouvelle monnaie a été mise en place et une maitrise des dépenses publiques.

La Turquie d’Erdogan : une démocratie turque à l’épreuve

L’AKP

Le passage vers une démocrature en Turquie se fait en raison de l’arrivée au pouvoir de l’AKP, parti politique reconnu comme islamo-conservateur actuellement à la tête de la Turquie, pays dirigé par le président Erdogan.

   C’est progressivement et majoritairement depuis 2003 que l’AKP commence à s’installer au pouvoir. Cette conquête débute lorsque Erdogan est nommé premier ministre et ce jusqu’en 2011 où il l’est pour la troisième fois. Toujours en 2011, cette année est marquée par la victoire de l’AKP aux élections législatives. En mars 2014 le parti politique remporte la majorité aux élections, et c’est en août que Erdogan devient président de la République. L’année suivante, en juin l’AKP perd la majorité absolue au Parlement mais la retrouvera grâce à une nouvelle élection en novembre.

Comité pour la protection des journalistes

   C’est alors d’importants moyens qui sont mis en place pour parvenir à un régime plus strict, on le remarque notamment avec un important manque de libertés, et la suppression de l’immunité parlementaires, en 2016, après la tentative de coup d’état, 160 journalistes ont été conduits en prison, 4000 juges révoqués, 150.000 fonctionnaires limogés, des opposants islamiques, kurdes, de gauche ou d’extrême gauche, détenus de longs mois sans procès. Des limites assez restrictives ont été instaurées concernant les médias:

   En 2014, après le dévoilement d’enregistrements incriminant le premier ministre turc sur Twitter, l’accès à ce réseaux social a été bloqué. Peu après, c’est Youtube qui à son tour a été empêché d’accès. Ce manque de liberté de presse est d’autant plus marqué par le rachat du groupe médiatique Dogan. La presse subit depuis un certain moment des pressions venant de la part du gouvernement.

D’après le classement mondial de la liberté de la presse établit par Reporters sans Frontières la Turquie occupait la 149éme place en 2015 et la 157éme en 2019.

«on assiste à un raidissement en Turquie en matière de droits de l’homme et des libertés fondamentales» Selçuk Demir

Avocat français

     A l’heure actuelle nous ne pouvons pas dire si la Turquie est une démocratie ou une dictature même si elle a tendance à basculer vers une dictature, car ce régime donne des libertés telles que le suffrage universel mais le régime instaure également un autoritarisme ainsi qu’une religion très présente dans le régime. Une des principales preuves que la Turquie bascule vers une dictature est le fait qu’il y a un énorme manque de liberté envers la presse et les médias. On constate donc que la Turquie est en train de devenir une dictature mais ne l’est pas complètement, on peut donc parler de démocrature.

Pour plus d’informations sur la Turquie

Nos sources: Wikipédia, Les inrocks, L’express, Lumni, le Monde, Slate, Youtube