L’histoire courte et mouvementée de la cathédrale du Christ Sauveur : entre construction, démolition et reconstruction

La cathédrale du Christ Sauveur est aujourd’hui la plus grande de Russie mais également le siège du Patriarcat Russe. Située en plein cœur de Moscou, elle est le symbole de la splendeur de la religion orthodoxe puisqu’elle est la plus grande cathédrale de l’Église Orthodoxe russe. Mais son succès n’a pas toujours été permanent comme en témoigne son histoire unique. Construite par les tsars, détruite par les bolcheviks et rebâtie à l’identique a la fin des années 90 avec le soutien du président de la Russie Boris Eltsine… Nous allons décrypter l’histoire de cette cathédrale et des différents enjeux qui ont mené à sa reconstruction.

Tout commence dès 1812 lorsque les trompes napoléoniennes sont vaincues par la Russie dirigée par le Tsar Alexandre 1er. Ce dernier fit construire un lieu de mémoire, le temple du Christ Sauveur à Moscou en l’honneur des combattants. Il chargea l’architecte Viltberg de ce projet et la 1ère pierre de la cathédrale fut posée le 13 septembre 1817 sur la Colline aux Moineaux, qui n’est par ailleurs pas l’actuel emplacement de la cathédrale actuelle. Le projet s’arrêta brutalement suite à la disparition d’Alexandre 1er et au renvoi de l’architecte par le nouvel empereur Nicolas 1er qui jugeait le projet trop long et trop coûteux. Enfin il le condamna également, pour détournement de fonds, à l’exil (mais il se dit qu’il aurait été condamné à tort, et qu’il était innocent).                                                                                                              

Cependant Nicolas 1er relança le projet, pour la gloire de la Russie, et la construction débuta en 1839, 22 ans après le premier projet, à l’actuel emplacement de la cathédrale du Christ Sauveur. C’est l’architecte Konstantin Ton qui se chargea de la construction jusqu’en 1883 (fin de la construction). D’après la légende, une abbesse aurait alors jeté une malédiction sur les ouvriers du chantier et promis un sort funeste à la cathédrale…

Sur cette photo, on peut voir l’aspect de la cathédrale à l’été 1931 avant d’être démolie

En 1917, la révolution d’Octobre a fait de la Russie un pays communiste, où religions et lieux de culte sont combattus. C’est ainsi qu’en 1931, Staline donne l’ordre de détruire à l’explosif la cathédrale du Christ Sauveur. La prophétie s’était réalisée.

Le pouvoir soviétique décide alors de de construire le Palais des Soviets afin d’immortaliser la grandeur postrévolutionnaire. Ce nouveau bâtiment devait être érigé à la place de la cathédrale réduite en poussière. Ce projet cependant ne vit jamais le jour car trop ambitieux (destiné à être le plus haut bâtiment du monde, avec 415 mètres de haut plus une statue de Lénine de 100 mètres) et trop coûteux notamment après l’invasion de l’armée allemande en 1941, pendant la seconde guerre mondiale. Il fut remplacer par la création de la plus grande piscine extérieure au monde en 1958, sur l’emplacement même de l’ancienne cathédrale.

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En effet, dès 1965 l’opinion se divise et une grande partie pense qu’une injustice a été commise lors de la destruction de la cathédrale du Christ Sauveur. Les critiques fusent, notamment de la part de Youri Gagarine (1er astronaute soviétique et 1er être humain à être allé dans l’espace en 1961) menant alors à la promotion de la reconstruction du temple par l’Église orthodoxe russe. Cette initiative fut également soutenue par Boris Eltsine président de la Russie à l’époque.  De nombreux fonds, parmi lesquels des dons privés, ont été récoltés et attribués à la reconstruction de la cathédrale.     

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La nouvelle cathédrale reprendrait, dans la mesure du possible, l’architecture de Konstantin Ton puisque la cathédrale fut construite beaucoup plus rapidement et avec de nouveaux matériaux différents de ceux utilisés à l’époque afin de s’adapter aux nouvelles technologies du XXème siècle. Les travaux débutèrent en 1995, pour une inauguration le 31 décembre 1999 à l’endroit où elle se dressait avant sa destruction par les Bolchéviks. On peut d’ailleurs noter que la nouvelle cathédrale du Christ sauveur hébergera les funérailles de Boris Eltsine en 2007, devenue un lieu de culte de l’église orthodoxe.                       

Après deux siècles d’une histoire pleine de rebondissements entre démolition, succession de différents pouvoirs politiques, la cathédrale du Christ Sauveur , reconstruite à l’identique, trône à nouveau fièrement sur les rives de la Moskova et est un des symboles de la capitale russe. A travers cet exemple, on peut voir l’importance des lieux patrimoniaux qui ne défendent plus de simples valeurs traditionnelles comme l’Église mais qui font partie intégrante des États notamment pour leur soft power, comme avec l’arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine en 2008, qui cultive son image « d’homme bon et proche du peuple » notamment en assistant à de nombreuse messes tels que celle de Pâques dans la cathédrale du Christ sauveur, désormais le siège de la religion orthodoxe en Russie.    

La cathédrale du Christ Sauveur a également été un lieu de rébellion contre la politique de Vladimir Poutine et de mouvements contestataires comme avec le groupe « Pussy Riot » (groupe de jeunes femmes russes, punk, féministes) qui en 2012, y est venu chanter une « prière anti-Poutine » faisant l’actualité des médias dans le monde entier. Elles sont par la suite condamnées à deux ans de prison. V. Poutine a approuvé cette peine, reprochant aux trois jeunes femmes de « saper les fondements de la morale », ce qui confirmait le resserrement des liens entre l’État et l’Église et l’importance de ses lieux patrimoniaux qui font désormais partis des enjeux des Etats quand a la mise en valeur de leur perception auprès des autres.

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https://www.rfi.fr/fr/emission/20190826-moscou-cathedrale-christ-sauveur-monuments-deuxieme-vie

sources: Russiable, RFI émissions, russia beyond, l’express

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