La tragédie de l’Exxon Valdez

RECIT. Le 24 mars 1989, l'"Exxon Valdez" noircit le golfe d'Alaska avec 39  000 tonnes de pétrole

Dans la nuit du 24 mars 1989, le superpétrolier Exxon Valdez heurte les récifs du banc Bligh Reef, en Alaska dans le détroit du prince William. Cette catastrophe endommage 11 des 13 citernes du navire et provoque le déversement de plus de 40.000 tonnes de pétrole dans l’Océan Pacifique. Cette erreur inexplicable provoqua une importante marée noire. Le capitaine du navire, Joseph Hazelwood, est soupçonné d’ivresse au moment de l’accident.  Il s’agit du pire incident du genre dans l’histoire des Etats-Unis. Cette marée noire s’est produite dans une zone sensible, peuplée d’orques, d’otaries, de loutres et d’aigles, de saumons. C’est aussi un refuge pour de nombreux oiseaux migrateurs. Ainsi, cette catastrophe a été dramatique au niveau écologique (des dizaines de milliers d’animaux se sont retrouvés englués dans le pétrole), mais aussi pour la population locale qui vit majoritairement de la pêche.

Il y a 25 ans, la catastrophe de l'Exxon Valdez

33 ans après l’Exxon Valdez hante encore les côtes de l’Alaska

En 1994, le tribunal fédéral américain condamne la compagnie pétrolière Exxon à verser cinq milliards de dollars de dommages et intérêts aux victimes de la marée noire. La négligence de l’équipage, à commencer par celle du capitaine, en état d’ébriété avancé ce soir-là, est mise en cause. Durant 15 ans, la compagnie américaine conteste le montant de la peine. Ramenée à 2,5 milliards en 2006, la somme est divisée par 10 pour atteindre 500 millions de dollars en 2008. Trente ans plus tard, les conséquences se font toujours sentir.  

Exxon Valdez : l'incroyable légèreté de l'être – Chamade

Aujourd’hui, il y a peu de traces visibles de cette catastrophe écologique, la plus grande partie des côtes souillées ont été nettoyées. Au printemps 1990, avec l’accord d’Exxon et sous la responsabilité des coast guards, quelques 10 000 travailleurs ont parcouru l’ensemble du littoral pollué. Mais le coût le plus élevé fut pour la nature et notamment la faune : 12,9 millions de harengs, 1,9 million de saumons, 250 000 oiseaux, 2 800 loutres et plus de 300 phoques périrent.

Whatever Happened To... the Exxon Valdez? | Discover Magazine

Une enquête a été faite pour savoir combien de temps serait nécessaire à l’écosystème pour se régénérer. La population de phoques a mis 17 ans à se rétablir. La Loutre de mer, elle, n’a retrouvé une population normale qu’en 2013 c’est-à-dire 24 ans après l’accident. Les orques, en revanche, ne se sont toujours pas remis de la marée noire, tout comme les harengs. Et si les plages ont l’air propres, il suffit de creuser quelques mètres pour retrouver des tonnes de pétrole enfoui dans le sol. Le problème, c’est que les hydrocarbures bien enfouis dans les sédiments disparaissent à très petite vitesse : à peine 4% sont éliminés annuellement. 

Les communautés locales ne se sont pas rétablies non plus. En effet, la marée noire de l’Exxon Valdez a eu un effet de domino socio-économique sur la population de la région qui ont une dépendance à la faune et la flore locale. La destruction d’un milieu naturel tue aussi toute l’économie qui en découle. L’économie de la région a été durement touchée. Dans le cas de l’Exxon Valdez, il s’agissait plus particulièrement de l’industrie de la pêche locale du hareng et du saumon.  Les débouchés pour les nouvelles générations sont fragilisés et les jeunes quittent donc la région. Cela est donc source de tensions qui se multiplient au sein de la population ainsi que du risque de précarité qui augmente. Le déclin des phoques, c’est à dire leur proie principale, et les niveaux croissants de pollution dans l’eau causent des maladies et des difficultés de reproduction. Les habitants du Detroit du Prince William sont traumatisés, méfiants face aux grandes entreprises mondiales.

Ce traumatisme a aussi généré des changements dans le transport maritime. Désormais, la double coque est obligatoire sur tous les pétroliers, et la navigation électronique est devenue la norme. La catastrophe de l’Exxon Valdez a donc été à l’origine d’un certain nombre d’avancées.

Voici quelques unes des plus grandes catastrophes pétrolières mondiales :

L’Amoco Cadiz : 16 mars 1978   227 000 tonnes d’hydrocarbures se sont échappées du navire
L’Exxon Valdez : 24 mars 1989   40 000 tonnes d’hydrocarbures se sont propagées dans la mer
Deepwater Horizon : 20 avril 2010   835 500 tonnes de pétrole déversées dans la mer
Sanchi : 2018   113 000 tonnes de pétrole déversées  

L’Exxon Valdez a marqué les esprits même si elle n’est pas la seule catastrophe pétrolière ni la plus importante. Les conséquences sont encore visibles aujourd’hui au niveau écologique ainsi qu’au niveau socio-économique. Ces catastrophes se font plus rares aujourd’hui mais elles nous interrogent quand même sur notre dépendance aux hydrocarbures dans le contexte du changement climatique.