On savait peu de choses sur les écosystèmes de la dorsale médio-atlantique et encore moins sur la zone proche de la zone de fracture Charlie-Gibbs jusqu’à ce que le projet international Mar-Eco, un projet de la campagne Census of Marine Life, soit lancé en 2001. Pendant dix ans, les scientifiques de 16 pays équipés de sous-marins, de véhicules télécommandés (ROV), de filets traditionnels et de haute technologie et d’autres technologies ont tenté de trouver des réponses aux questions les plus brûlantes.
En quoi la zone Charlie-Gibbs montre t-elle une volonté de protection de la biodiversité mais aussi une volonté de coopération entre États ?
La Zone Charlie-Gibbs
La zone de protection marine Charlie-Gibbs (CG-MPA) fait partie du premier ensemble de six nouvelles aires de conservation dans les eaux internationales de l’Atlantique Nord.
Cette zone se situe en haute mer, soit au-delà des 200 milles limitant les zones économiques exclusives des États côtiers, et de leurs extensions de plateaux continentaux: elle ne dépend donc d’aucune juridiction nationale.
La partie sud de la CG-MPA a été annoncée en 2010 par la Commission OSPAR (La Convention pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est définit les modalités de la coopération internationale pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du nord-est. Elle est entrée en vigueur le 25 mars 1998, et remplace les Conventions d’Oslo et de Paris) pour protéger la biodiversité unique de la zone de fracture Charlie-Gibbs.
Une biodiversité unique qui a besoin d’être protégée:
En effet, dans cette zone, les eaux polaires et australes se rencontrent, ce qui permet une productivité et une richesse en espèces particulièrement élevées. On a par exemple identifié 99 espèces de poissons pélagiques (vivant dans les eaux de haute mer), avec une augmentation de la production de plancton , mais également des espèces migratrices tel que les les baleines ou encore les oiseaux de mer.
Les principales menaces connues à ce jour pour les écosystèmes de la dorsale médio-atlantique proviennent de trois décennies de pêche en haute mer d’espèces sensibles à croissance lente et de l’utilisation d’engins de pêche lourds, qui sont exploités au contact du fond marin. Cela peut détruire en quelques instants les peuplements de coraux, les éponges fragiles et autres invertébrés sessiles (c’est à dire des organismes seuls ou vivant en colonies) vieux de plusieurs milliers d’années.
On retrouve également comme menaces futures l’exploitation minière en haute mer de minéraux mais aussi les impacts du changement climatique.
Qui peut protéger la haute mer internationale ?:
Cette zone a été choisie en 2010 pour être l’une des AMP de haute mer en Atlantique Nord, dans un but de mettre en place la gestion à long terme pour préserver les habitats, les espèces et les processus écosystémiques en protégeant une zone de menaces telles que la pêche, le déversement de déchets, l’extraction de pétrole et de gaz, l’exploitation minière, la bio-prospection et autres.
-Un accord entre plusieurs institutions: C’est pourquoi de nombreux acteurs se mobilisent pour protéger cette zone malgré le fait que la protection des zones au-delà de la juridiction nationale est plus compliquée que dans les zones sous juridiction nationale. Cependant, il existe des conventions et des autorités qui fournissent un cadre pour les eaux internationales. On retrouve notamment la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS, ou Convention de Montego Bay) , l’ISA (International Seabed Authority), la CBD (Convention sur la diversité biologique), mais aussi la CPANE (Commission de Pêche de l’Antlantique du Nord-Est).
-Le rôle important d’OSPAR: Pour la protection de cette zone on trouve surtout OPSPAR qui vise à protéger, conserver et restaurer les écosystèmes et la diversité biologique de l’espace maritime, qui sont affectés par les activités humaines. Il a été un forum moteur pour l’identification et la désignation des premières aires marines protégées en haute mer au monde, y compris l’AMP Charlie-Gibbs.
OSPAR est la convention sur les mers régionales qui œuvre à la protection de l’environnement marin de l’Atlantique du Nord-Est et de ses régions : les eaux arctiques, la grande mer du Nord, y compris la Manche, les mers celtiques, le golfe de Gascogne et la côte ibérique, et le grand Atlantique, y compris les eaux entourant les Açores.
Les parties contractantes à la convention OSPAR sont la Belgique, le Danemark, la Communauté européenne, la Finlande, la France, l’Allemagne, l’Islande, l’Irlande, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Norvège, le Portugal, l’Espagne, la Suède, la Suisse et le Royaume-Uni.
Mais d’où vient le nom de cette AMP ?
Étonnamment, “Charlie Gibbs” n’est pas le nom d’une personne. En fait, la zone a d’abord été baptisée “zone de fracture Charlie” en 1967, d’après la station météorologique océanique “Charlie” des garde-côtes américains située dans la région. Le nom “Gibbs” provient en fait du navire de la marine américaine “Josiah Willard Gibbs” qui a été utilisé pour effectuer la première étude approfondie de la zone. Josiah Willard Gibbs était un physicien, chimiste et mathématicien américain. Le nom est donc en fait un mot composé, c’est pourquoi Charlie-Gibbs s’écrit avec un trait d’union.